Dans son discours, ce 21 juillet 2017, date marquant de la fête nationale de son pays, l’Ambassadeur de Belgique en République démocratique du Congo, Bertrand de Crombrugghe, a insisté sur la pertinence des relations belgo-congolaises, et des leçons à retenir mutuellement, tout en vantant le parcours de son pays depuis la prestation de serment par Léopold 1er.
Plusieurs personnalités politico-religieuses de deux pays, venues par millier, avaient pris d’assaut l’Ecole belge, mieux le Lycée Prince de Liège de Kinshasa. Et pour cause, célébrer pour la 186ème fois la fête nationale belge. Il s’agit, en effet, de commémorer la prestation de serment du premier Roi des Belges, Léopold 1er.
Le choix du Lycée Prince de Liège
Fidèle à la tradition, l’ambassadeur Bertrand de Crombrugghe a commencé son discours de circonstance avec un peu d’humour. Et cela, pour justifier le choix du cadre.
« Je suis ravi de vous accueillir en ces lieux imprégnés du thème de la scolarité. Nous ne savons jamais rien définitivement, nous avons toujours à apprendre. Je vous emmène donc, de retour sur la ‘’route de l’école’’. Quoi de plus enchantant, quoi de plus efficace pour se redonner un vernis de jeunesse ! », a-t-il dit, sourire aux lèvres. Et d’ajouter : « nous avons une excellente raison de nous retrouver ici. Cette année, l’Ecole belge célèbre le cinquantième anniversaire de son existence. Cela fait cinquante ans que le Lycée Prince de Liège et son homologue néerlandophone Prins van Luik School forment, éduquent, enseignent et animent une jeunesse qui est à 20 % belge et à 80 % congolaise ». Et se s’exclamer : « Il n’y a pas de plus beau symbole de l’engagement durable de la Belgique en République démocratique du Congo. Il n’y a pas de plus bel indicateur de la proximité qui s’est affirmée avec le temps entre Belges et Congolais !».
Poursuivant dans la même lancée, il a lancé : « Parmi nous ce soir, il doit y avoir des anciens élèves, des gamins et des gamines devenus méconnaissables depuis qu’ils ont frotté les pans de leurs vêtements sur les bancs de cette école. Vont-ils ce soir reprendre les jeux d’antan : saute-mouton ou saut à la corde ? Qu’ils se lâchent ! Qu’ils nous content les espiègleries dont ils gratifiaient leurs professeurs. Qu’ils avouent les 400 coups qu’ils ont commis …, sans crainte. Aujourd’hui, promis, il est trop tard pour punir ».
Le secret d’une Belgique forte
Le 21 juillet, rappelle la prestation de serment du premier Roi des Belges, Léopold 1er. C’était en 1831. Comme chacun de ses successeurs, il jura « d’observer la Constitution et les lois du peuple belge, de maintenir l’indépendance nationale et l’intégrité du territoire. », un serment qui ne fût jamais démenti. En effet, les rois y ont montré un respect infaillible pour la Constitution qui précise que tous les pouvoirs émanent de la nation, non pas du souverain. Et cette nation s’exprime au moyen d’élections régulières qui assurent à intervalles réguliers que gouvernants et gouvernés demeurent en accord sur les lois et règlements qui les régissent.
Ce principe a parfaitement payé. Gouverné dans l’intérêt de sa population, le Royaume de Belgique a prospéré et, ce qui a joué un rôle extrêmement important, a fait le choix d’être ouvert sur l’extérieur. Fort de son cheminement démocratique et du soutien de sa population, ce pays est devenu un acteur international engagé. Il a négocié la Charte mettant sur pied l’ONU, l’acte fondateur des relations internationales. Il participe activement aux travaux des agences onusiennes auxquelles il prête un concours en ressources humaines et en ressources financières. Il adhère au multilatéralisme efficace et aux relations entre états fondées sur le droit et le respect mutuel. Il consacre la moitié de son aide au développement aux pays les plus démunis et les plus vulnérables. Ainsi, la Belgique se voit-elle comme un membre qui reçoit et aussi qui donne à la communauté internationale. Son engagement se traduit par une candidature pour un siège non-permanent au Conseil de Sécurité de l’ONU pour la période 2019-2020 afin de « Bâtir le consensus, Agir pour la Paix ».
Sur son propre continent, la Belgique s’est faite un acteur de l’intégration régionale. Elle forme aujourd’hui l’Union européenne avec 27 autres Etats membres, une Union au niveau de laquelle s’exerce désormais une bonne partie de la gouvernance la concernant. Grâce à l’UE, les occasions d’épanouissement pour les Belges ont été décuplées et les opportunités économiques pour les entreprises se sont multipliées. Cet engagement, avec d’autres partenaires, a concrétisé durablement l’exercice des libertés.
Ces défis seront au centre de la conversation lors du prochain sommet entre l’UE et l’Afrique en novembre prochain, à Abidjan. Les deux continents pourraient alors se regarder par-delà la Mer Méditerranée, et cogiter sur la définition des contours de leur partenariat.
Relations bilatérales
Les relations entre la Belgique et la Rd Congo doivent épouser celles qui s’élaborent entre l’Europe et l’Afrique. Elles doivent contribuer à des paradigmes justes qui permettent de réaliser le bien supérieur pour tous.
Ces relations sont chargées d’histoire. Et sur nombre de sujets, un devoir de mémoire est à l’ordre du jour. De quoi prendre acte. La Belgique et la Rd Congo de 2017 n’ont plus rien à voir avec la rencontre violente et impitoyable du XIXème siècle entre une société traditionnelle et une modernité si mal nommée. Et plus rien non plus à voir avec les affrontements des années ’60.
Le monde progresse à vive allure. La croissance économique est de retour, en Afrique comme ailleurs. Il importe de rejoindre le mouvement, d’en être partie prenante. L’heure n’est pas à la tergiversation ou au repli sur soi. Ce serait stérile, improductif et facteur d’exclusion plutôt que dynamique d’épanouissement. L’heure, au contraire, est à l’engagement résolu dans la coopération internationale et à l’acceptation de sa contrepartie. Car en effet, recueillir sa part de la prospérité mondiale, jouir des avantages de la citoyenneté internationale, cela suppose que l’on adopte les principes de gouvernance, les normes et les valeurs universelles qui les sous-tendent. Ainsi aussi pour la République démocratique du Congo.
Nouvelle vision belge de la Rd Congo
Ici, le souhait est d’être complice, dans un projet qui place la personne humaine, libre d’agir mais aussi responsable de ses actions, au centre des préoccupations. Les Belges orientent leurs vies et exercent leurs options sur base de libertés qui leur sont garanties par un gouvernement démocratiquement élu. Les Congolais et les Congolaises aussi devraient pouvoir s’épanouir, exercer leurs talents et saisir des opportunités sous l’œil bienveillant d’un système de gouvernement qui leur laisse cette possibilité et respecte leur dignité.
Les Congolais regorgent de talent, d’énergie et de courage. Ils font face avec imagination et créativité, sinon avec patience, à l’adversité qui les confronte au quotidien. En outre, ils sont nombreux ces Belges qui se sont installés durablement en Rd Congo, qui lui ont consacré leurs énergies, leurs talents et leurs vies, comme entrepreneur, comme missionnaire, comme académicien ou comme professionnel. De même, ils sont nombreux ces Congolais qui font leur chemin en Belgique et qui contribuent à son dynamisme, à sa diversité, à son ouverture sur le monde. Il y a un capital inouï d’humanité, d’empathie et de solidarité entre les deux peuples.
Ces relations ont donc énormément d’étoffe, à la manière des relations familiales qui évoluent mais aussi résistent à l’épreuve du temps. Occasionnellement, ce n’est un secret pour personne, le ton peut monter. « Entre proches, la franchise est de mise, et parfois nous nous disons ce que peut-être nous ne souhaitons pas entendre. Qu’à cela ne tienne, du moment que nous nous efforçons à maîtriser ces moments, à leur conserver leurs justes proportions et à ne pas laisser l’humeur voiler le contenu des messages que nous devons échanger par nécessité. Comme le formulait le grand Mahatma Ghandi : la vérité peut être dure comme le diamant mais aussi fragile comme la fleur d’un pêcher. Il faut en prendre soin », a renchéri le Belge, comme pour dire que Belgique et Rdc restent inséparables, malgré vents et marées.
Et pour conclure, Bertrand de Crombrugghe a reconnu que fondamentalement, Belges et Congolais ont encore beaucoup à se dire, à réaliser ensemble, et même, comme Sa Majesté le Roi Philippe le formule dans son discours de circonstance à la même occasion,’’ à apprendre l’un de l’autre’’.
Le rendez-vous a donc été un lieu indiqué pour célébrer les liens. « Que les Congolais sachent que la Belgique veut rester un partenaire fort et durable tout comme nous apprécions leur contribution à notre diversité et à notre rayonnement. La construction de la nouvelle Chancellerie, bien en vue sur le Boulevard du 30 juin, se veut une preuve tangible de l’attachement de la Belgique à nos relations », a-t-il terminé, sous une pluie d’ovations à n’en point finir.
Emmanuel Badibanga