Grève à la SCPT: L’œuvre d’une main noire ?

Le mouvement de grève sauvage, en cours, dans la Société Commerciale des Transports et des Ports (SCPT), ex-Office National des Transports (ONATRA), prend des allures d’une insurrection, avec comme corollaire de nombreux actes de vandalisme et d’atteinte à l’intégrité physique de tous ceux qui s’y opposent. Pneus, cercueils et autres projectiles volent dans une ambiance électrique. La direction générale, qui a pris ses fonctions, il y a juste trois mois, est empêchée de pénétrer dans ses bureaux. De nombreuses victimes se comptent parmi ses agents et cadres. L’entreprise publique, lourdement endettée, est au bord du précipice. Avec des conséquences irrémédiables sur le plan social, si la grève persistait. Ce qui semble, malheureusement, le cas. Loin donc de faire l’unanimité, au sein de l’entreprise, le sit-in, débute en juin 2017 et qui se déroule devant le bâtiment administratif de la société, se radicalise de jour en jour et compte, dans la foule, des intrus, des visages inconnus dans la société, au point que les bonnes âmes s’interrogent sur ses véritables motivations. La SCTP va-t-il droit dans le mur ? Et qui en profite ? Tentative de réponse ici.
Investie en mars 2017, l’actuelle direction générale de la SCTP a demandé aux agents en grève, accusant à l’époque trois mois d’arriérés, de lui laisser cent jours pour décanter la situation. Mais un nouveau sit-in a été déclenché, de nulle part, avant l’expiration du délai, exigeant la destitution immédiate de la direction générale pour, prétendument, six mois d’arriérés de salaire.
Une grève qui cache la forêt
Mais, contrairement à tous les précédents mouvements de grève qui ont secoué la SCTP, celui-ci a méconnu la procédure en la matière. Aucun cahier de charge, portant revendications claire, n’a été déposé au préalable, par aucun syndicat, pour justifier la grève. Ce qui a surpris tout le monde. Car, au même moment, la direction générale et les différents syndicats étaient autour d’une table pour trouver des solutions. Ainsi, sur terrain, le mouvement est conduit par des meneurs qui ne sont ni agents, ni délégués syndicaux, ni syndicalistes. En outre, il n’appartient aucunement à un syndicat de démettre les autorités de leurs fonctions. Or, ici, ce mouvement a barricadé le bureau du directeur général et empêche toute son équipe de pénétrer dans le bâtiment administratif qui abrite le siège de la SCTP. Ce qui est contre-productif, puisque, sans dialogue et travail, l’entreprise est dans l’impasse. Que veulent alors les manifestants ? La démission de l’actuelle direction générale pour non-paiement de salaires, situation que cette dernière a héritée et tente de résoudre dans un contexte particulièrement difficile.
Il faut se rappeler que l’ancienne direction a été remerciée pour «megestion », caractérisée tant par la spoliation du patrimoine de l’ex-Onatra, que par un endettement colossal et irrégulier. Le comité révoqué a laissé une ardoise de 7,5 millions de dollars américains, sur laquelle, il faut ajouter la dette des fournisseurs et les avances empochées auprès des clients. Au total, le passif de la SCTP s’élèverait à près de 115 millions de dollars américains. C’est exactement pour cette mauvaise gestion que le Conseil d’Administration de la SCTP, défendant énergiquement les intérêts de la boite, a suspendu, puis obtenu la révocation de l’ancienne direction générale. Cela est de notoriété publique. Les vrais agents de la SCTP ne peuvent donc pas se tromper de l’identité de vrais responsables de leurs malheurs. Logiquement, ils ne peuvent pas en vouloir à l’équipe actuelle.
Terrible équation pour sortir de l’impasse
Il convient de rappeler que la SCPT tire l’essentiel de ses recettes de l’exploitation du port de Matadi, soit 98%. A ce jour, compte tenu, de l’environnement économique exécrable, hérité du comité révoqué, les recettes mensuelles de la SCTP s’élèvent entre 2,5 millions. La masse salariale est de 5 millions pour 22.000 agents dénombrés. Comment s’en sortir quand on sait que, d’une part, les factures sont nanties et que les banques récupèrent leur quotte part, au moindre paiement. D’autre part, les clients de la SCTP ne paient pas leur facture en intégralité. Ils déduisent les avances perçues par la SCTP. D’où les difficultés de payer les salaires et même d’assurer les frais de fonctionnement. Par quelle magie, les caisses d’une entreprise lourdement endettée se sont renflouées ? Il y a manifestement eu un déficit de communication pour que les agents arrivent à se laisser convaincre, par on sait que esprit, que la SCTP aurait beaucoup d’argent et que les dirigeants actuels ne voudraient pas, volontairement, les payer. Sous quelque endroit que l’on se place, les revendications portant sur le départ de la direction générale et même du Conseil d’administration, ne sauraient se justifier. Manifestement quelques mains noires agissent en coulisses. Mais lesquelles ? Celles-là à qui profite justement le crime. Pas les agents, dont a évoqué les arriérés de salaire ; Pas, non plus, l’actuelle direction générale, qui fait tout son possible pour régler les problèmes.
Par contre, les responsables de la lourde ardoise de la SCTP y ont intérêt. Il faut noter que les nombreuses malversations, mises à leur charge devraient représenter autant de défis pour les agents, aux côtés des actuels gestionnaires. C’est le cas de la spoliation du patrimoine de la SCPT. Il appartiendrait à tous les agents d’empêcher la scandaleuse spoliation du port de Kinshasa dont un patron de medias est bénéficiaire. Et ce à la suite d’un contrat signé, irrégulièrement, de gré à gré, entre l’ancien directeur général et l’épouse du responsable d’une chaine de télévision. En effet, selon la loi en vigueur, tout acte engageant l’entreprise, doit être soumis au Conseil d’administration qui ici ignorait tout de la transaction. A ce jour, ce dernier a obtenu, de la justice, la suspension des travaux. Ce qui a déversé une colère médiatique, orchestrée par les perdants, sur ce conseil qui est manifestement victime de sa clairvoyance.
Tout compte fait, le dialogue devrait être privilégié entre tous ceux qui aiment encore la SCTP pour faire face à cette grève sauvage. Car, dans les coulisses, une main noire, mercenaire, ne jure que sur la disparition de la SCPT.
L’Avenir