LE FCC ET L’URGENCE DE L’ARTICULATION D’UNE VISION REPUBLICAINE ET L’INNOVATION POLITIQUE

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«Autant les hommes sont perfectibles, autant les sociétés sont propices au progrès, même lorsqu’elles sont affligées par les pires des folies humaines» (Hubert Kabasu Babu Katulondi)

La création du Front Commun de Congolais (FCC) par l’initiative du Président sortant Joseph Kabila, dans la perspective des enjeux électoraux de décembre 2018, est un événement de très haute portée historique pour la RDC. L’opportunisme conjugué au négationnisme, tous deux inhérents aux déficiences de l’arène politique, ont empêché la société de repérer, en profondeur, le potentiel de cette méga-force politique. Mais, ne nous voilons pas la face : si certains politiciens souscrivent à l’initiative du FCC par un sincère élan nationaliste, beaucoup d’autres y perçoivent seulement un mécanisme de maintient au gouvernement ou une rampe d’accès aux fonctions étatiques  après les prochaines élections. A l’antipode, certains détracteurs de J.Kabila voient dans le FCC exclusivement un stratagème maléfique. Il serait conçu pour assurer le soutient à son hypothétique illégal (et belliqueux) troisième mandat. Une autre école de pensée, proche de l’opposition, y cerne aussi une tentative de fédérer le maximum de politiciens prébendiers pouvant soutenir un dauphin à la Medvedev-Poutine. Quel que soit l’angle de vue, in fine, la perception de la personnalisation politique et le réductionnisme électoraliste du FCC est dominante.

Dans cette politoscopie analytique, comme libre-penseur dans sa mission de la luminescence de la conscience collective, je voudrais en appeler aux autorités du FCC, mais aussi à la société en général, en faveur d’un effort de rupture et d’innovation politique tant cognitive qu’organisationnelle. Le but de cette exploration politologique est d’épingler la tare de personnalisation politique combinée au réductionnisme électoraliste qui guette déjà le FCC à sa racine. Je soutiens qu’il est encore temps d’apporter des actions correctives pouvant modeler le FCC en disjonction d’avec l’impotence transformationnelle tant décriée de la MP, pour lui donner une fonction républicaine et lui assurer la durabilité. Le péril discernable par les esprits perspicaces est la transposition des déficiences idéologiques et politiques de la MP dans le FCC. Cela lui ôterait, ainsi, déjà en amont, la possibilité d’éclore comme une force de propulsion politique dont la RDC a tant besoin pour accélérer son élan d’atteinte de l’émergence en 2030.

  1. LE FCC DOIT ABSOLUMENT ETRE INNOVANT ET PROTEGE CONTRE LES APORIES POLITIQUES DE LA M.P

Dans une large mesure, la phénoménologie politique du FCC ne présente pas le tableau d’une répétition de l’histoire, mais le piège/périls d’une continuité historique. Notons, d’abord au plan idéique, que les bribes de rationalité présentées par certains ténors du FCC (Thambwe Mwamba, Azarias Ruberwa et Kalala Tshibangu) lors d’un Grand Plateau animé par le Guru journalistique Congolais Kibambi Shintwa sur Télé 50, étaient raisonnables. Mais, leur structuration intellectuelle ne portait pas des matériaux idéiques substantiels pour une méga-coalition de ce calibre – à un tel tournant délicat de notre histoire. De même, la tentative de justification entreprise par l’illustre historien (arche-intello) Elikia M’Bokolo au sujet de son adhésion très controversée au FCC, n’a pas été à l’altitude de la portée historique d’une telle organisation politique. En substance, les ministres précités ont fourni une explication situationniste dans laquelle ils ont insisté sur la nécessité de fédérer les acteurs politiques de la Majorité Présidentielle et les «opposants-gouvernants» afin d’organiser une méga-coalition maximisant la possibilité de la victoire électorale d’un candidat commun autour d’un programme commun qui est jusque-là inconnu! L’historien M’Bokolo que je continuerais toujours à admirer (Francis Bacon, Maynard Keynes, furent des politiciens controversés à leurs époques), lui, a justifié son adhésion par la continuité de sa contribution aux activités des négociations politiques de la Cité de l’U.A et de la CENCO. Il y est aussi ajouté la défense de la souveraineté de la RDC et la lutte contre la balkanisation. Cette narrative connue depuis 1960, récitée par Lumumba, ensuite reprise par les Mobutistes attaqués par l’AFDL, brandie par le régime de Mzé Kabila contre le RCD/MLC, peut-elle servir de prima ratio pour la conquête du pouvoir 58 ans après? On sait que la balkanisation est plus un spectre brandi à des fins politiciennes, par les communicateurs et stratèges de la MP pour protéger le régime affaibli par la crise de légitimité. La RDC n’est pas balkanisable et aucun pays n’a une politique d’Etat à cette fin.  Sous cette lumière, il apparait de manière générale, jusque là, que le FCC ne propose pas encore un concept matriciel en idée-force, aucune innovation en narrative ou en finalité politique substantielle et durable composant son ultime rationalité politique. Au fond, le FCC reprend la discursivité de l’AMP/MP.

Dans tous ces cas de figure, la finalité est principalement électoraliste, sans consensus préalable sur les enjeux développementaux dans la durée (…dont la visée électorale ne serait qu’un moyen et non une fin ultime). Donc le FCC risque d’être exclusivement une machine de la conquête et la monopolisation du pouvoir, comme l’AMP et la MP. Le FCC fait face au péril d’être instrumentalisé pour mobiliser le plus grand nombre des leaders politiques et leurs réseaux provinciaux sur tout le territoire, afin de préserver la main mise directe ou indirect de l’oligarchie «MPénne» sur l’Etat, avec comme associés les anciens opposants. Ce serait alors la continuité de la MP avec ses apories tant décriées, sous une autre appellation. Une indéniable tare mobutiste, irrémédiablement antithétique au canon de la démocratie pluraliste. Les opposants, surtout ceux issus de l’UDPS, et certains cadres du PPRD de bon aloi (porteurs de l’Esprit Ubuntu), ont l’obligation historique de disjonction avec les déficiences décriées de la MP, dans un FCC modelé pour la renaissance politique du Congo. En particulier les opposants porteurs de la sève Tshisekedienne, doivent y apporter leur potion curative de changement. Ces opposants doivent absolument démontrer leur valeur ajoutée dans le FCC, basée sur les idées et pratiques politiques d’excellence qu’ils peuvent y apporter, surtout au niveau d’un leadership éclairé et normatif. Il serait hérétique qu’ils s’y engagent comme de nouveaux acolytes-associés de la MP dans une stratégie d’instrumentalisation politico-électorale du FCC.

  1. L’ERE D’UNE VISION SYNERGETIQUE REPUBLICAINE IMPERSONNELLE ET SOUTENABLE DANS LA DUREE

Comme le souligne Pierre Cappelaere, avec une remarquable pertinence du reste, dans son ouvrage « Congo (RDC) : Puissance et Faiblesse » (L’Harmattan, 2011), ce pays n’est absolument pas condamné à crouler sous des calamités politiques récurrentes. Autant les hommes sont perfectibles, autant les sociétés sont propices au progrès, même lorsqu’elles sont affligées par les pires des folies humaines. Dans cette optique, la perspective éclairée ci-haut sert à nous faire prendre conscience de nos faiblesses, pour qu’ensemble nous puissions chercher les modalités de leur correction. Nous ne pouvons pas continuer à cheminer dans les mêmes inepties – sans avoir le courage de reconnaitre nos égarements. Même, dans l’opposition, ses leaders doivent s’exorciser de leur égotisme et repenser une action conjuguée en faveur du progrès collectif.

Ainsi donc, au regard de la perspective offerte ci-dessus, il est urgent (et possible) que le FCC connaisse l’orientation politique d’une véritable force de réinvention politique congolaise. Les opposants qui s’y sont engagés ainsi que les brillants intellectuels qui y ont adhéré (ils sont libres et ne devraient pas être juges avec frivolité)  ne devraient pas aller se faire immerger dans les tares autoritaristes régressives. De même, certains hauts cadres et intellectuels distingués embrigadés nolens/volens dans la MP qui se lamentaient jours et nuits des déficiences opérationnelles de ladite MP, ont maintenant l’opportunité de proposer un remodelage politique propice à l’accélération de la transformation du Congo. On ne peut pas créer une méga-coalition pour demeurer dans les mêmes apories décriées acrimonieusement. A l’instar de l’ANC qui est en réalité une méga-coalition (COSATU-SACP-ANC), le FCC peut devenir une corporation politique néo-révolutionnaire.

Il ne s’agit pas ici d’amorcer une sorte de tabula rasa absolu sur les accomplissements ou les acquis du régime Kabiliste. Bien au contraire, tout en capitalisant les acquis de cette dispensation et en conceptualisant ses contradictions, il convient de composer une vision impersonnelle dont la substance est républicaine, axée sur la transformation expansive et accélérée de la RDC. En d’autres termes, il est historiquement, intellectuellement et politiquement impératif de proposer une rationalité du FCC qui est dépersonnalisée, qui fédère par son attractivité logique et son imaginaire bénéfique à toute la société.

A ce sujet, Il convient de marteler le théorème de la «consolidologie» (consolidology) soutenu par les illustres théoriciens de la démocratie moderne, notamment Joseph Schumpeter, Samuel Huntington, Larrry Diamond. Selon ce théorème, les troisièmes élections post-transitionnelles déterminent la consolidation de la démocratie grâce aux nouvelles pratiques politiques innovantes des élites. Dotées de raison, elles prennent conscience de leurs déficiences, mais aussi de leurs potentialités au regard de leurs réalisations, après les deux derniers cycles électoraux et les mandats y ayant découlés. Samuel Huntington, en particulier, soulignant l’inéluctable «systemic problem» de la démocratie prescrit que les élites doivent collaborer, tout en gardant leurs persuasions politiques, pour chercher un consensus minimal sur les modalités du progrès collectif. On pourrait alors affirmer que le FCC répond à cette prescription Huntingtonnienne. Il est serait donc aberrant, dans cette perspective, de tomber encore dans les apories d’un méga-groupe politique sans impact transformationnel éclatant sur le pays. Une congrégation de politiciens qui ne sert qu’à faire élire les gens, gérer les ambitions des politiciens patrimonialistes, manipuler les organes délibérants pour passer des lois et motions en faveur de ses acolytes, et ennuyer les téléspectateurs avec une communication politique kafkaïenne rationalisant les inepties gouvernementales patentes. On tomberait alors dans l’analogie fort élucidante de M’Zee Laurent Kabila : Un Conglomérat….Ce serait outrageusement anachronique et régressif, au lieu de l’élan progressiste que le FCC peut impulser.

  1. CONCLUSION

LE FCC COMME CREUSET REPUBLICAIN DU NEW CONGO DEAL : C’EST POSSIBLE.

En nous inspirant de la parrhésia  de Michel Foucault dans ses enseignements au Collège de France en 1984 (Le Courage de la Vérité. Le Gouvernement de Soit et des Autres) nous devons avoir la vaillance de dire la vérité au pouvoir pour le progrès de la République. Dans cette optique de la parrésia foucaldienne on peut donc peut affirmer qu’il faut de la vertu de la vaillance intellectuelle à l’élite politique entourant le Président J.Kabila pour l’amener à comprendre la nécessité absolue de donner au Congo l’opportunité historique de se réinventer avec un autre leadership et d’autres idées. Maintenant, il faut que la RDC passe de l’ère Kabilienne, dont les réalisations sont indéniables (sauf si l’on souffre de négationnisme morbide) à une nouvelle étape historique. Un âge de la réinvention de la RDC où un leadership en game-changer porteur de la volonté de puissance, doit accélérer la reconstruction, consolider la démocratisation, diversifier l’économie, cimenter la cohésion nationale, amener les FARDC dans une action robuste d’extermination des hordes criminelles à l’Est du pays, faire briller le blason du pays sur l’échiquier international. Il nous faut donc un autre génie politique (statemanship) pour lancer la dynamique de la réinvention du Congo comme puissance étatique Africaine.

Joseph Kabila n’est pas du tout porteur des effets maléfiques imparables qui rendraient débile tout autre président à sa solde. L’argument ici est scientifique : c’est démontré que dans la praxis gouvernementale moderne qui développe les nations, la personnalité, l’expérience existentielle et professionnelle, le cursus académique, l’interaction politique, voir l’immersion en culture mondiale, déterminent aussi la performance des leaders ayant enclenché les mutations fulgurantes des sociétés. Le Professeur James Robinson  (probable prix Nobel en économie) le démontre dans le célèbre bestseller «Why Nations Fail ». L’illustre politologue Américain, Samuel Huntington, l’un des savants de la pensée politique mondiale contemporaine, le démontre également dans «The Third Wave of Democratisation ». Ce dernier indique que dans la plupart des pays ayant connu une démocratisation régénératrice de leurs sociétés, ce sont les leaders émanant des régimes précédents qui ont remplacé les anciens chefs et actionné des changements remarquables. Le FCC peut dont émerger comme l’espace de  l’intelligence politique synergétique, alliant expérience de certains acteurs de bon aloi de l’ancienne MP, les leaders de l’opposition porteurs d’une sève néo-révolutionnaire, et aussi les personnes ressources nationales et de la Diaspora, pour le New Congo Deal.

 

Hubert Kabasu Babu Katulondi (Libre-penseur et Ecrivain)

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