Mardi après-midi marquait à l’Assemblée nationale la suite des débats sur la loi portant statut des anciens Présidents de la République élus. L’extension de privilèges aux chefs des corps constitués ayant été levée par les élus du peuple, l’adoption est intervenue assez rapidement, non sans la démonstration d’Aubin Minaku qui a recadré une partie des députés sur le caractère impersonnel d’une loi et sur l’exigence de consolider définitivement la paix entre Congolais et la démocratie dans ce pays. En clair, la loi va régler le sort des anciens Présidents de la République et des chambres parlementaires élus. Le statut des autres corps constitués sera, lui, fixé par un décret du Premier ministre.
Les députés nationaux ont poursuivi ce mardi 17 juillet 2018, leurs travaux amorcés lors de la séance plénière du lundi dernier, relatifs à l’examen et vote portant statut des anciens Présidents de la République élus. D’abord par les réponses de la commission PAJ (Politique, administrative et juridique) aux préoccupations soulevées par les élus du peuple.
Pour ce faire, le président de cette commission PAJ de l’Assemblée nationale a pu rencontrer les questions de ses collègues sur trois volets. Il a argumenté sur l’extension de la loi aux corps constitués (d’autres institutions de la République) avant d’expliquer la base constitutionnelle de cette loi et de conclure sur l’impact financier de la loi, tout en considérant l’équilibre des fonctions.
A la suite de ces réponses, le président de l’Assemblée nationale, Aubin Minaku Ndjalandjoko a rappelé l’historique de la loi en examen, laquelle a été gérée pendant trois ans au Sénat avant d’être votée par la Chambre haute du Parlement. Pour le speaker de la Chambre basse du Parlement, il est question d’organiser davantage la démocratie avant la tenue des prochaines élections. Le député national réélu d’Idiofa, dans la province du Kwilu, estime qu’il faudrait régler les problèmes des Congolais pour enfin affiner la démocratie congolaise.
Après cette intervention du premier des députés nationaux, le débat général sur cette matière a été clos. Et l’assemblée plénière a approuvé les conclusions du rapport de la commission PAJ.
Ce qui a provoqué le mécontentement d’une poignée de députés nationaux, membres de l’Opposition. Ces derniers ont claqué la porte de la salle des congrès du Palais du peuple juste après une motion incidentielle de leur collègue Fabien Mutomb réfutant cette approbation du rapport de la commission PAJ.
Malgré ce petit boycott, la séance plénière s’est poursuivie sans désemparer. Et le député national Pius Muabilu est monté au créneau pour dénoncer ce comportement de ses collègues de l’Opposition du haut de la tribune. L’élu kinois de Mont-Amba a même accordé une interview à la presse pour fustiger cette attitude des opposants.
Petit rappel du caractère impersonnel de la loi
Et le président de l’Assemblée nationale de faire aux députés qui tombaient dans le piège de voir le cas particulier de Joseph Kabila dans cette proposition de lois le rappel sur le caractère impersonnel de la règle de droit. Une règle de droit, a-t-il expliqué, est une règle de conduite, ayant un caractère général, abstrait et obligatoire, une finalité sociale, et qui indique ce qui devrait être fait dans une situation donnée. On la qualifie d’impersonnelle car elle vaut pour toutes les personnes qui se trouvent ou se trouveront dans une décision objectivement déterminée, et elle définit alors la conduite à tenir dans cette situation. La loi est formulée en termes généraux, a insisté Aubin Minaku.
L’option a été ensuite levée en faveur de l’extension de la loi. Pour l’Assemblée nationale, la loi sous examen concerne les anciens Présidents de la République élus et les anciens présidents élus des deux chambres du Parlement.
Quant aux chefs des corps constitués, leur sort sera déterminé par un décret du Premier ministre. C’est sur base de cette option levée que la commission a été appelée à traiter les amendements.
Puis, la plénière souveraine a procédé à l’examen à fond (adoption article par article, l’intitulé et l’exposé des motifs) de ce texte de loi. Le quorum n’étant pas atteint, le vote global de cette loi a été organisé au cours d’une séance subséquente.
A l’issue du vote, les élus du peuple ont adopté à l’unanimité la proposition de loi portant statut des anciens Présidents de la République et des chambres parlementaires élus. Puisque voté en des termes non identiques par les deux chambres parlementaires, ce texte de loi fera l’objet d’une commission mixte paritaire Assemblée nationale – Sénat, avant la délibération finale, si désaccord persiste, par l’Assemblée nationale et la promulgation de la loi par le Président de la République.
Historique de la proposition de loi
Cette nouvelle loi initiée par le sénateur Modeste Mutinga tire sa pertinence de l’article 104 alinéa 6 de la Constitution de la République du 18 février 2006 telle que modifiée à ce jour. Elle fixe le statut des anciens Présidents de la République élus. Elle détermine les règles spécifiques concernant leurs droits et devoirs, le régime de leurs incompatibilités, leur statut pénal ainsi que les avantages leur reconnus.
Telle que présentée par la commission PAJ de l’Assemblée nationale après examen, cette loi détermine également les avantages accordés aux anciens présidents des chambres du Parlement. Pour le législateur, la présente loi entend consolider la démocratie, en l’occurrence, par le mécanisme de l’alternance démocratique.
Cette loi stipule que tout ancien Président de la République élu jouit des droits spécifiques. Il a droit à des mesures et à des dispositions particulières en matière de sécurité pour la protection de sa personne, de sa famille et de ses biens. Il a droit à l’honneur, à la dignité et à la considération.
Il a droit à la protection sociale de l’état dans les cas et les conditions définis par la présente loi. Il a droit de porter le titre de « Président de la République honoraire ». Et il a droit aux avantages spécifiques tels que définis par la présente loi.
« Un décret du Premier ministre délibéré en conseil des ministres détermine les conditions dans lesquelles des honneurs officiels peuvent être rendus à un ancien Président de la République élu », stipule ce texte de loi. En sa qualité de sénateur à vie, tout Président de la République élu est soumis à toutes les incompatibilités prévues par l’article 108 de la Constitution. Toutefois, il peut exercer des fonctions rémunérées conférées par un organisme international dont la Rdc est membre.
Et concernant le statut pénal, cette loi de Mutinga édicte en son article 7 que tout ancien Président de la République élu dispose de l’immunité des poursuites judiciaires pour les actes posés dans l’exercice de ses fonctions. Pour ceux posés en dehors de l’exercice de ses fonctions, les poursuites contre tout ancien Président de la République élu sont soumises au vote à la majorité des deux tiers des membres du Parlement composant le Congrès suivant la procédure prévue par le Règlement intérieur.
Et dans son article 9, la loi stipule qu’en matière de crimes contre la paix et la sécurité de l’humanité commis par tout ancien Président de la République élu, les juridictions nationales ont priorité sur toute juridiction internationale ou étrangère.
Les avantages accordés à tout ancien Président de la République élu comprennent la pension spéciale, l’allocation annuelle pour services rendus, les soins de santé, la rente de survie et la rente d’orphelin. Nul besoin de revenir sur le bienfondé des régimes de privilèges post-présidentiels. En effet, de quelque culture ou civilisation que ce soit, les sociétés humaines ont toujours tenu à accorder un statut privilégié à leurs souverains. L’intérêt particulier accordé par la loi votée à la solennité de la fonction présidentielle en RDC est plutôt une preuve de maturité politique des élus du peuple.
(Jules Kidinda/Lepetit Baende)