A peine publié par la Commission électorale nationale indépendante (CENI), le calendrier global des élections est au centre de controverse. Si l’opposition dans toute sa globalité le rejette, la Majorité Présidentielle à travers le Congrès national congolais (CNC) l’applaudit de deux mains et lance même un appel aux partenaires d’apporter leur appui à la Centrale électorale. Au cas où le calendrier électoral ne serait pas respecté, Me Clément Kitengye, Secrétaire national du CNC en charge des relations avec les partis politiques et le Parlement, estime que nous serions obligés de nous rabattre sur l’Accord de la Saint-Sylvestre qui parle de la convocation de la tripartite (CENI-CENSA-gouvernement). Laquelle est appelée à apprécier consensuellement le temps nécessaire pour le parachèvement desdites élections. Comme pour dire que ce délai n’est plus fixe ; mais ouvert.
Le président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), Corneille Nangaa a publié dimanche dernier le calendrier électoral, dans un contexte où trois calendriers électoraux ont été successivement publiés par la CENI en 2012, 2014 et 2015. Pour diverses raisons, ils n’ont malheureusement pas été exécutés. Face à ce contexte, le président de la CENI a invité les uns et les autres à éviter des réactions et attitudes susceptibles de conduire à l’enlisement du processus électoral. Prêt à aller aux élections, le Congrès national congolais (CNC), à travers son Secrétaire national en charge des relations avec les partis politiques et le Parlement, Me Clément Kitengye Kisaka a salué la publication de ce calendrier car, dit-il, la CENI est entrain de respecter toutes les prérogatives imposées par la Constitution. « Je lui donne toutes les chances pour que nous allions aux élections d’autant plus qu’au CNC, nous avons tout un tas de candidats qui attendent que cette réalité puisse être concrétisée », dit-il.
La CENI a-t-elle subi quelque pression dans la publication du calendrier ? Me Clément est de ceux qui pensent que la CENI demeure indépendante et elle en fait preuve depuis les élections de 2006. Et d’ajouter : elle a motivé ce calendrier électoral à travers chaque étape et toutes les contraintes qu’elle peut connaitre.
A la question de savoir si ces contraintes peuvent retarder l’organisation des élections, le cadre du CNC rétorque : nous sommes dans une question qui est technique, dit-il.
Citant Corneille Nangaa, il constate que celui-ci a été honnête de nous dire que les contraintes que nous pouvons connaître peuvent être d’ordre technique, logistique, financier, même des contraintes sécuritaires. Pour arriver à ces différentes dates, il faut que toutes les parties fassent un effort pour que nous puissions être au-dessus de ces contraintes, alors on respectera chacune d’elle.
Le CNC n’attend que les élections
Est-ce que le CNC est réellement prêt ? «Je vous ai dit que nous sommes déjà prêt, nous attendons depuis bien longtemps ces élections, contrairement à nos frères de l’opposition qui n’ont fait que dire qu’ils étaient pour les élections au mois de décembre 2017, mais sans en apporter d’explication technique ni scientifique. Mais aussi sans nous dire que nous pouvons arriver à cette étape-là par rapport à ceci, par rapport à cela. Tout ce qu’ils disent, c’est qu’à la date du 31 décembre 2017, ça sera la fin du mandat de Kabila, alors que la Constitution est très claire là-dessus », explique-t-il, avant de citer l’article 70 qui parle des députés, sénateurs et autres qui ne peuvent être remplacés qu’au moment où il y a eu effectivement élections. Ainsi, tant que cela n’est pas fait, et le président de la République, et les députés nationaux, et les sénateurs, et les députés provinciaux, tous les autres demeureront. C’est ici qu’il a demandé à tous les Congolais d’avoir la maîtrise les textes et en l’espèce, l’article 70 alinéa1 qui stipule que le président de la République est élu au suffrage universel direct pour un mandat de 5 ans, renouvelable une seule fois. Et l’alinéa 2 de soutenir qu’à la fin de son mandat, le président de la République reste en fonction jusqu’à l’installation effective du nouveau président élu. Ceci, c’est la base.
Toutefois, pour des raisons politiques, dans le cadre de l’accord du 31 décembre 2016, dans son point VI.2, l’opposition et la Majorité Présidentielle ont eu à s’entendre. « Les parties prenantes conviennent de l’organisation des élections en une seule séquence présidentielle, législatives nationales et provinciales, au plus tard en décembre 2017 », rappelle-t-il, avant de soutenir : nos frères opposants n’ont pas le courage de le dire ; surtout que c’est eux-mêmes qui sont signataires du même accord, ils font fi d’une disposition relative aux attributions du CNSA qui fait état que ce dernier, le gouvernement et la CENI auront à apprécier consensuellement le temps nécessaire pour le parachèvement desdites élections. Donc, ce délai n’est plus fixe ; mais ouvert.
A l’en croire, autant que lorsque nous prenons un comprimé d’un médicament, nous faisons foi au médecin, mais nous pouvons lui opposer ce qui est contenu dans le mode d’emploi. Le mode d’emploi ici, c’est la Constitution et l’accord de la Saint-Sylvestre. Donc, il y a lieu pour nos frères de pouvoir nécessairement lire la Constitution. Cet exercice appartient à tout le monde. Cela n’appartient pas tout simplement aux juristes, mais à tout le monde.
Qu’est-ce qui arriverait si le calendrier n’est pas respecté ?
Pour Me Clément Kitengye Kisaka, s’il n’est pas respecté, ce qu’il ne peut être correctement respecté que s’il n’y a pas de contraintes. Mais s’il y a des contraintes, il ne sera pas totalement respecté. Nous serons obligés de nous rabattre sur cet accord pour que cette tripartite puisse nous proposer un nouveau délai. Lorsqu’on parle des contraintes, explique-t-il, elles sont d’ordre logistique, financier, légal et sécuritaire, mais elles peuvent aussi être les intempéries ou la guerre. C’est ainsi que nous en appelons à ces gens qui disent qu’ils ont envie de financer les élections, d’aider la CENI à disponibiliser assez de moyens; à suffisamment sécuriser le territoire national pour qu’il n’y ait pas d’empêchement à ce que les kits se déploient.
Selon cet avocat au Barreau de Kinshasa/Gombe, si le Congolais aime son pays, il doit savoir que nous sommes une toute petite démocratie. Il doit savoir que c’est en 2006 que le président Joseph Kabila nous a amenés aux élections. A ce titre-là, nous n’avons pas à être très exigeants comme cela se fait aux Etats-Unis d’Amérique, en Belgique, en France, en Espagne, même s’il y a des problèmes avec la Catalogne qui voudrait se retirer. Est-ce que le comportement du gouvernement central est bon par rapport à la Catalogne ? Ça c’est une autre analyse ! Du reste, c’est un pays indépendant, nous laissons les Espagnols se tirailler entre eux. « Je pense que nous devons aimer notre pays. Pour ce faire, nous devons aller aux élections. Nous avons une CENI, nous tous, MP et opposition, nous sommes dans cette CENI. Il n’y a pas que la MP dans la CENI, mais aussi l’opposition et la société civile. S’ils ne sont pas contents, qu’ils démissionnent. Il faudrait que nous soyons sincères avec nous-mêmes », recommande l’avocat congolais, qui pense que tous les partis politiques doivent se préparer aux élections et laisser la CENI faire son travail. Le débat selon lequel la CENI est de mauvaise foi, c’est un faux-fuyant et en vérité, je pense que si vous menez une bonne enquête, vous verrez où se penche la vérité.
(Propos recueillis par Jean-Marie Nkambua)