La date du 16 octobre restera dans les annales, parce qu’elle marque l’entrée par la grande porte de la République Démocratique du Congo au Conseil des Nations Unies aux Droits de l’homme à New York. En effet, elle été élue lundi pour un mandat de trois ans par 151 voix sur 193 votants, selon une information largement partagée sur les réseaux sociaux. Selon la source, les candidatures de la RDC et de trois autres pays africains ont été proposées par le groupe de pays africains afin d’occuper les quatre sièges alloués au continent à ce Conseil fort de 47 membres, basé à Genève.
Nombreux étaient les partis politiques, les plates-formes et les Ong à s’opposer à l’élection de la Rd Congo au Conseil des Nations Unies aux Droits de l’homme. Que la bataille a été rude jusqu’à la fin, pour permettre à la délégation congolaise de marquer une fois de plus des points. Nombreux ont été les obstacles, mais cette victoire aura été la conséquence d’autant d’efforts et d’intenses discussions, pour faire aux partie prenante de la décision de la Rdc de s’inscrire dans le respect et la promotion des droits de l’homme.
« Il y a eu beaucoup de puissances nocives qui ont voulu que la Rdc retire sa candidature, pendant que d’autres battaient campagne pour boycotter la candidature congolaise », s’est expliqué Léonard She Okitundu, Vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères et Intégration régionale. Pour lui, cette victoire est d’abord celle du Président de la République, Joseph Kabila Kabange, celui-là même qui a été non seulement le premier à croire, mais aussi à lui doter des moyens conséquents pour sillonner dans les capitales africaines, afin de défendre la candidature de la Rdc. C’est aussi une victoire du peuple congolais, selon lui, parce que c’est la Rdc qui siégera désormais à Genève (Suisse), siège du Conseil.
Soulignons que l’élection de la RDC au sein du Haut Commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme est aussi le résultat d’une campagne intense menée par la ministre des Droits humains, Marie-Ange Mushobekwa, en séjour depuis une semaine à New York, à la tête d’une forte délégation. Mme Mushobekwa a évoqué des progrès réalisés par la RDC dans le domaine des droits de l’homme, soulignant que sa candidature est bien justifiée en vue de lui permettre de faire entendre sa voix à ce sujet. Elle a, dans son plaidoyer, expliqué les contacts pris avec différents pays africains, de l’Amérique latine et des Caraïbes qui selon elle, ont soutenu la candidature de la RDC.
La ministre des Droits humains a, par ailleurs, rappelé le retrait de la RDC de la liste noire des pays spécialisés dans le recrutement d’enfants soldats, ainsi que des avancées enregistrées dans la lutte contre l’impunité et l’organisation des procès équitables contre des auteurs de violations graves des droits humains dans l’espace Kasaïen et partout ailleurs dans le pays.
En réaction à cette élection, le gouvernement congolais se félicite de cette nouvelle. Ceux qui s’opposaient à cette candidature « ont échoué ! Le monde entier –et pas seulement l’Afrique, puisque 151 voix, c’est au-delà du continent africain – vient de nous apporter un soutien significatif », a déclaré le porte-parole du gouvernement, Lambert Mende. Selon lui, la RDC va devoir mettre à contribution son expérience en la matière au service du Conseil des droits de l’homme de l’ONU.
De l’origine du Conseil des droits de l’homme
S’inscrivant dans un courant de réforme des Nations unies impulsé par le Secrétaire général Kofi Annan au cours des années 1997 à 2005, la création du Conseil est pour la première fois suggérée dans un rapport de mars 2005, où il est noté que « des États ont cherché à se faire élire à la Commission non pas pour défendre les droits de l’Homme mais pour se soustraire aux critiques, ou pour critiquer les autres », discréditant la Commission et ternissant l’image des Nations unies. C’est pour cette raison qu’il est suggéré la création d’un Conseil des droits de l’homme, qui serait plus crédible (notamment via son mode d’élection réformée qui serait directement issu de l’Assemblée générale, avec un domaine de compétence plus vaste et qui pourrait devenir « soit un organe principal de l’ONU soit un organe subsidiaire de l’Assemblée générale », le hissant au rang d’institution et non plus de simple organe fonctionnel du Conseil économique et social. Selon le document de travail pour septembre 2005 du Secrétaire général des Nations unies, « ces premières mesures concrètes pourraient être l’amorce d’un changement de cap visionnaire pour l’humanité. »
Sa création est décidée après le Sommet mondial des Nations unies de septembre 2005 et la résolution 60/251 de l’Assemblée générale du 15 mars 20065 dont le brouillon est présenté par le diplomate suédois Jan Eliasson, et fait du Conseil un organe subsidiaire de l’Assemblée générale, avec la première élection organisée le 9 mai 2006, une durée du mandat initial des membres déterminée par tirage au sort, tout en respectant une répartition géographique équitable.
La première session ordinaire du Conseil s’ouvre le 19 juin 2006 et une deuxième se tient du 19 septembre au 6 octobre suivant. Les États membres du Conseil décident de se donner une année pour redéfinir leurs règles de fonctionnement, au moyen de groupes de travail spécifiques. Au cours de la deuxième session, ils examinent l’ensemble des rapports qui en mars-avril 2006.
Deux autres sessions ordinaires se tiennent, du 29 novembre au 8 décembre 2006 et du 12 mars au 6 avril 2007. Parallèlement, les représentants des États se retrouvent au cours de plusieurs sessions de travail intergouvernemental pour définir les nouvelles règles de fonctionnement du Conseil6 qui sont adoptées lors de la 5e session, réunie du 11 au 18 juin 2007. Un des principaux changements consiste en la mise en place d’un mécanisme d’examen périodique universel (EPU) de tous les pays au regard des droits de l’homme7.
En 2007, est créé le comité consultatif du Conseil des droits de l’homme composé de 18 experts siégeant à titre individuel, faisant fonction de groupe de réflexion attaché au Conseil, et de rapporteurs spéciaux des Nations unies chargés des droits économiques, sociaux et culturels (logement convenable, droit à l’alimentation (en)8), droits civils et politiques, droit au développement, droits des peuples et de groupes des minorités et individus particuliers9.
Sous la présidence de George W. Bush, les États-Unis s’opposent à la création d’un Conseil sous cette forme. Ils ont par le passé vivement critiqué l’ancienne Commission, qu’ils jugeaient avoir perdu toute crédibilité à cause de la présence de plusieurs pays violant les droits de l’Homme. Les garanties apportés par la création de ce nouveau Conseil ne les satisfaisant pas, ils ne se présentent pas comme candidats à la première élection. Mais l’entrée en fonction de Barack Obama change la politique du pays à cet égard. Dans une lettre du 22 avril 2009, la représentante permanente des États-Unis auprès de l’ONU, Susan Rice, annonce l’intention de son pays de se porter candidat à un siège au Conseil des droits de l’homme10 et le 12 mai, les États-Unis sont élus membres du Conseil pour un mandat courant jusqu’en 2012.
Le 26 mars 2012, Israël décide de rompre tout contact avec le Conseil des droits de l’homme, jugeant que ce dernier est biaisé et qu’il se concentre de manière disproportionnée sur la situation des territoires occupés. Cette annonce fait suite à la décision du Conseil de démarrer une mission d’enquête internationale indépendante sur l’impact des colonies israéliennes dans les Territoires palestiniens occupés. En conséquence, Israël devient le premier pays à ne pas se soumettre à l’examen périodique universel le 11 janvier 2013. Dans sa décision OM/7/01, le Conseil décide de repousser l’examen en octobre 2013. Après avoir rappelé les diverses dispositions relatives à l’EPU, le Conseil s’attarde à souligner l’obligation de coopération qui pèse sur les États en vertu de l’article 56 de la Charte. Il demande donc à Israël de coopérer à nouveau, prie le « président du Conseil des droits de l’Homme de prendre toutes les mesures appropriées, conformément à son mandat, pour exhorter l’État examiné à coopérer de nouveau avec le mécanisme de l’examen périodique universel ».
Selon son point 6, la décision crée également un précédent procédural pour les cas futurs. Lors de la 17è session, Israël décide finalement de se présenter. La question relative à la mise en œuvre de recommandations faites durant l’EPU reste en suspens. Lors de l’examen, le Conseil insiste sur l’importance pour les États de prendre une part active à l’EPU (notamment en mettant en œuvre les recommandations) et de ne pas se limiter à une participation passive, consistant juste de se présenter à l’EPU.
(JMNK)