Candidat du FCC à l’élection présidentielle: C’est Shadary
Après des jours d’intense suspens, enfin le président de la République, Joseph Kabila Kabange a porté son choix sur un chevronné de la politique du pays, le fidèle des fidèles, en la personne d’Emmanuel Ramazani Shadary, Secrétaire permanent du PPRD. Il a déposé hier sa candidature à la CENI, accompagné de tous les membres du Front Commun pour le Congo (FCC). C’est lui qui a désormais la lourde responsabilité de représenter le FCC à l’élection présidentielle du 23 décembre 2018. Et c’est lui encore que les membres de cette méga plateforme créée à l’initiative du chef de l’Etat vont soutenir, surtout qu’il est le candidat unique et qui doit avoir un programme d’action qui sera soutenu et défendu par tous les sociétaires.
Le choix de ce natif de Kabambaré aura étonné presque tout le monde, d’autant plus qu’il n’était pas dans la short liste de beaucoup de maisons de sondage, même si le chef de l’Etat a tenu compte de ses qualités intrinsèques. Et même lorsque les propositions étaient faites au président de la République, jamais son nom n’avait figuré en tête de liste. Comme pour dire que Joseph Kabila aura surpris plus d’une personne, surtout ceux-là qui se considéraient déjà comme dauphins.
Des critères
Comparativement à d’autres candidats à ce même poste au sein de sa famille politique, Emmanuel Ramazani Shadary a eu à réunir à lui seul plusieurs critères qui ont plaidé en sa faveur, et qui ont fait la différence. Notamment :
- Candidat de la cohésion (consensus) : Shadary, contrairement à ceux qui étaient cités avant lui, est le candidat qui assure la sérénité au sein de la famille politique proche au chef de l’Etat. Il est mieux placé pour assurer la continuité de l’action entreprise par le président Joseph Kabila. Elu et réélu dans sa circonscription électorale de Kabambare, dans la province du Maniema, Shadary un candidat non conflictogène et qui mettra tout le monde d’accord autour d’un projet.
- Membre du 1er parti politique de la Majorité présidentielle : le PPRD, sa formation politique d’origine, est incontestablement la première force politique au sein du Front Commun pour le Congo, avec autant de députés à l’Assemblée nationale. Et le dévolu ne pouvait tomber que sur le PPRD qui désormais, devra montrer de quoi il est capable.
- Il est le n°1 de ce parti politique : en sa qualité de Secrétaire Permanent, Shadary est le numéro du parti présidentiel et il était tout à fait logique qu’il soit le candidat de cette famille politique. Un autre choix aurait étonné tout le monde. D’ailleurs, sa récente tournée dans l’ex-province de l’Equateur et dans l’ex-Katanga l’ont propulsé au-devant de la scène. Non seulement qu’il a redynamisé le parti, il a été en contact direct avec la population. Ce qui lui a permis de se faire une idée sur les enjeux et les défis qui l’attendent.
- Expérience professionnelle : même s’il va évoluer dans l’ombre du président de la République, Ramazani à une expérience qui lui permettra, tant bien que mal, de corriger ce qui n’a pas été bien fait.
Quel bilan ?
Outre tout ce qui a été dit, nombreux sont ceux-là qui veulent savoir ce qu’Emmanuel Ramazani Shadary a réellement fait pour mériter la confiance du chef de l’Etat. L’on se rappellera que lorsque le président du groupe parlementaire PPRD à l’Assemblée nationale, puis Coordonnateur de la Majorité Présidentielle à l’Assemblée nationale arrive au Gouvernement, il trouve un conflit « Kamuina Nsapu » qui était mal géré et risquait de se propager sur une bonne partie du pays.
Il va alors changer d’approche pour privilégier la réconciliation et le pardon, avant de faire intervenir la force et la justice. Et sa recette sera payante. Il va ordonner l’exhumation et la restitution du corps du chef coutumier tué, organiser sa succession et apporter une aide substantielle du Gouvernement aux populations meurtries par ce conflit. Il s’en suivra par la suite l’organisation de la conférence dans cet espace Kasaï, qui permettra aux fils et filles de cette partie du pays de se regarder en face pour se dire la vérité, et proposer des pistes de solution pour le décollage de ces provinces touchées. C’est grâce à la paix retrouvée que l’enrôlement des populations va avoir lieu, ce qui a permis d’espérer que ces populations participent aux élections qui pointent à l’horizon.
Le Vice-premier ministre et ministre de l’Intérieur et Sécurité, Secrétaire général adjoint, puis actuellement, Secrétaire permanent du PPRD n’a pas eu un mandat facile. Pour faire face au conflit qui déchirait Bantous et pygmées, il n’a épargné aucun effort. C’est ainsi qu’il a usé de la même méthodologie qui avait produit des résultats escomptés dans l’espace Kasaï. Il va réconcilier les deux communautés, avant qu’une conférence sur la paix et le développement ne soit organisée à la grande satisfaction générale.
Toujours au cours de son bref mandat, ce catholique pratiquant a été aperçu à Djugu, dans la province de l’Ituri, où le conflit Hema et Lendu risquait d’embraser toute une région. Grâce aux FARDC dont le moral était au Top, ce conflit va prendre fin, et les populations déplacées retourneront chez elles, bien accompagnées par le Gouvernement. Shadary ne s’est pas arrêté là, il était à la base de la libération d’étrangers pris en otage dans la province du Maniema.
Terminons ce chapitre pour dire que Shadary est celui qui a défendu avec brio la loi électorale dans toutes les deux chambres, celle-là même qui permet aujourd’hui à la CENI d’organiser les élections attendues de tout le monde.
Des défis
Comme nous venons de le dire, Ramazani Shadary devra situer son action dans la continuité des œuvres entreprises par Joseph Kabila. Et son discours du 19 juillet 2018 devant l’Assemblée nationale et le Sénat réunis en congrès, constituera un début pour cet habitué de la politique congolaise. Sinon dans ce discours, Joseph Kabila constate qu’en dépit des résultats engrangés, il reste vrai qu’en termes de perspectives, les conditions sociales des populations demeurent globalement préoccupantes, en raison du seuil important de pauvreté, particulièrement en milieux ruraux et semi-urbains. Elles devront donc rester au centre de toutes les politiques publiques.
De même, les progrès incontestés dans le domaine de la scolarisation de nos enfants ne devraient pas occulter la nécessité de nouveaux investissements à faire, en vue d’améliorer la qualité et l’efficacité de notre système éducatif.
Il en est de même de la lutte contre le chômage des jeunes qui devrait se poursuivre à travers la formation professionnelle, de manière à stimuler l’esprit d’entrepreneuriat en nos enfants pour qu’à leur tour, avec les talents dont le bon Dieu les a dotés, ils participent à la création de la richesse nationale.
Au plan économique, la pérennité de la croissance sera tributaire des engagements additionnels en matière de diversification de l’économie, à travers principalement la relance de l’agriculture, spécialement dans les filières des produits d’exportation à forte dose de valeur ajoutée et le développement de l’industrie, y compris touristique. Elle sera également fonction de la poursuite des réformes structurantes notamment, au plan fiscal, dans le cadre de l’amélioration du climat des affaires et de l’environnement sécuritaire.
La défense de l’intégrité territoriale de la Rdc devra demeurer une des priorités du pays et ce, pour des raisons évidentes. Shadary devra continuer à privilégier une politique étrangère de bon voisinage, assumant ainsi la part de responsabilité au plan de la stabilité régionale. De même, le Congo reste un pays ouvert, entretenant des relations décomplexées avec les autres pays du monde.
Ramazani devra veiller à ce que la justice congolaise préserve son vrai rôle de régulateur de la vie sociale et de protecteur de l’ordre public. C’est notamment à ce prix que l’impunité sera conjurée à jamais, et partant la banalisation, fût-elle au nom des considérations politiques, des valeurs essentielles de la société protégées par la loi pénale.
(Jean-Marie Nkambua)