L’Assemblée nationale a tenu hier mercredi 04 avril 2018 sa deuxième séance plénière de la session parlementaire ordinaire de mars 2018. Laquelle plénière, présidée par le 2ème vice-président de la Chambre basse du parlement, M. Rémy Massamba, était essentiellement consacrée au contrôle parlementaire.
A cet effet, les députés nationaux ont eu à auditionner un membre du Gouvernement de la République et un responsable d’une entreprise publique. Il s’agit du ministre national de l’Environnement et Développement durable, M. Ami Ambatobe, et du directeur général de la SNEL (Société nationale d’électricité).
Le ministre était invité pour être auditionné par la représentation nationale sur la position du Gouvernement congolais face au projet Transqua consistant au transfèrement des eaux de la rivière Oubangui vers le lac Tchad, en état très avancé d’assèchement. Et pour le Dg de la Snel, lui, était convié à répondre à une question orale avec débat lui adressée par le député national Balamage sur la hausse des facturations de la Snel aux Congolais.
La parole lui étant accordée en premier, le ministre Ami Ambatobe a donné des éclairages les députés nationaux autour de cette épineuse problématique du transfèrement des eaux de la rivière Oubangui vers le lac Tchad. Et il a donné la position du Gouvernement par rapport au projet Transaqua, qui est une question d’actualité sensible et de souveraineté nationale que stratégique.
Ce qu’a expliqué le ministre aux députés
Le ministre a d’abord informé les élus du peuple sur l’historique sur l’idée du transfèrement des eaux du territoire national vers les autres pays, avant d’expliquer le contexte sous-régional et international de la question de transfèrement des eaux. Il a aussi permis les députés nationaux à comprendre les mesures et stratégies en rapport avec la Gestion intégrée des ressources en eau (GIRE), avant de leur faire part des perspectives d’avenir et de conclure.
Dans ses explications, le ministre a souligné que le bassin du Congo fait l’objet d’une double sollicitation relative au transfèrement des eaux, l’une vers le bassin du lac Tchad et l’autre vers l’Afrique australe. En dépit de différentes initiatives au niveau sous-régional et international, a indiqué le ministre Ami Ambatobe, c’est en 2014 que la Rdc a mis en place une commission interministérielle sur la problématique du transfèrement des eaux du bassin du fleuve Congo vers le lac Tchad.
Les membres de cette commission ont produit des termes de référence des études de faisabilité sur ce projet pour en identifier les conséquences positives et négatives. Notamment, sur le plan environnemental, socio-économique, touristique, technique, et géopolitique et politique interne. Faute de financement, a renseigné le ministre, ces termes de référence sont restés lettres mortes.
Toutefois, il a relevé les inconvénients pour la Rdc, de ce transfèrement des eaux au lac Tchad. Lesquels porteraient selon lui, entre autres, sur le devenir du barrage et du projet Grand Inga ; le devenir de la mangrove avec ses zones de frayeur particulières ; le devenir de la biodiversité du fleuve Congo et de ses affluents ; ainsi que le risque du réchauffement climatique qui résulterait de l’évaporation du carbone (environ trois cent milliards de tonnes) contenu dans les tourbières du Bassin du Congo.
Quant aux avantages de ce transfèrement des eaux, le ministre Ami Ambatobe estime qu’ils seraient d’ordre économique. « Car l’eau brute, vendue aux pays sous stress hydrique, pourrait effectivement rapporter au pays plus que le pétrole et autres ressources naturelles », a-t-il dit.
Transfert des eaux, il faut le référendum et des études au préalable
Le ministre a toutefois rassuré les députés nationaux que la position du Gouvernement est claire à ce sujet : « Tout transfèrement des eaux du fleuve Congo vers le lac Tchad est conditionné par des études préalables. Ce qui d’ailleurs exclurait tout transfèrement à partir de l’Oubangui ; avec possibilité de l’envisager à partir de l’embouchure du fleuve Congo ». Tout cela, a-t-il souligné, sans préjudice de consultation in fine du peuple congolais tout entier par voie de référendum comme l’exige la Constitution en son article 214 alinéa 2, et à la Loi relative à l’eau en son article 53.
« Par conséquent, toute déclaration tendant à faire croire à l’opinion que la République démocratique du Congo aurait accepté ce transfèrement des eaux de l’Oubangui ou du fleuve Congo vers le lac Tchad, n’engage ni de prêt, ni de loin, le Gouvernement de la République », a déclaré le ministre de l’Environnement et Développement durable Ami Ambatobe.
Au regard des enjeux, a-t-il conclu, le Ministère de l’Environnement propose inscrire cette question du transfèrement des eaux parmi les questions stratégiquement prioritaires ; allouer exceptionnellement un budget consistant au Ministère de l’Environnement, pour faire face à cette situation ; organiser un lobbying de taille pour expliquer la bonne volonté de la Rdc à assister les autres pays, mais après études d’impacts environnementaux et sociaux.
Mais aussi et surtout, le Ministère de l’Environnement sollicite le soutien du Parlement de la République pour ce dossier brûlant. « Nous attendons des représentants du peuple que vous êtes, une recommandation forte à l’égard du Gouvernement », a enfin dit le ministre Ambatobe.
Projet Transaqua ou complot international contre la Rdc ?
Un débat s’en est suivi après cette intervention magistrale du n°1 de l’Environnement. Pour rappel, cette audition du ministre a été déclenchée à cause d’une motion d’information qui a été soulevée le mardi 27 mars dernier lors de la toute première séance plénière de cette session de mars 2018, par le député national Patrick Mayombe, par rapport à cette problématique du transfèrement des eaux du bassin du fleuve Congo.
Il a été le premier à prendre la parole lors du débat. Il s’est dit satisfait de l’intervention du ministre de l’Environnement. Et il lui a recommandé de faire arrêter un certain M. Kalele, responsable d’une Ong congolaise bénéficiant d’un financement international, et qui se fait passer pour le représentant de la Rdc à des rencontres internationales organisées de ce projet Transaqua.
Le député Patrick Mayombe a également encouragé le ministre Ami Ambatobe de frapper fort afin de remettre les choses dans l’ordre face à ce projet. Il a été suivi et soutenu par l’honorable Eve Bazaïba. Celle-ci, membre rapporteur de la cellule parlementaire qui a été mise en place par l’Assemblée nationale par rapport à ce projet, a éclairé la lanterne de ses collègues députés nationaux en leur indiquant quelques éléments de précision concernant les enjeux du projet.
Et elle a démontré noir sur blanc les grands désavantages que porte ce projet Transqua qui est une menace grave, tant contre la biodiversité de la Rdc et l’écosystème congolais, que contre la vie des communautés congolaises. Ainsi, a-t-elle déclaré que « ce projet a des allures d’un complot international contre la Rdc ».
Et pour sa part, l’élu de Mushie, le député national Didace Pembe, président du parti politique les Verts, a soutenu que cette problématique du transfèrement des eaux de l’Oubangui au lac Tchad doit faire l’objet d’un débat national.
Puis il y a eu une motion incidentielle du député national Henry Thomas Lokondo. Il estime que ce débat s’enlise, puisque le ministre au cours de son intervention a affirmé que le Gouvernement de la Rdc n’a jamais signé l’accord sur le transfèrement des eaux de l’Oubangui au lac Tchad.
L’élu de Mbandaka a demandé au Gouvernement de la République de déclarer clairement que la Rdc n’est pas d’accord avec ce projet, et de ce fait, saisir le Conseil de sécurité des Nations Unies ainsi que les autres organisations tant internationales, régionales et sous-régionales sur ce sujet.
Le député Lokondo a par conséquent a sollicité et obtenu de l’auguste assemblée, la clôture de ce débat, pour s’en tenir aux recommandations formulées par le ministre.
Le Dg de la Snel a 48 heures pour répondre aux députés
Après que le premier point inscrit à l’ordre du jour soit clos, les députés nationaux étaient conviés à suivre la réponse du directeur général de la Snel à la question orale lui adressée par leur collègue Balamage sur la hausse des facturations de la Snel aux Congolais. Dans ses éléments de réponse, le Dg de la Snel a fait part aux élus du peuple des difficultés et défis auxquels fait face sa société.
Ces éléments de réponse n’ont pas convaincu les parlementaires de la chambre basse qui se sont exprimés lors du débat général. A cette occasion, ils ont adressé au Dg de la Snel des grandes questions, et ils ont soulevé des véritables préoccupations de la population par rapport la mauvaise qualité de service que lui offre la Snel à ce jour.
A l’issue du débat, vu la pertinence, la sensibilité et le nombre des questions soulevées par les députés nationaux, le Dg de la Snel n’a pas pu répondre tout de suite. Ainsi, a-t-il sollicité à l’assemblée plénière un court délai pour lui permettre de revenir avec des réponses qui s’imposent aux questions lui posées. Avec l’assentiment de l’auguste Assemblée, le bureau de l’Assemblée nationale a accordé un délai de 48 heures au Dg de la Snel pour lui permettre de préparer la réplique.
(Lepetit Baende)