«Personnellement, je ne suis pas d’accord avec cette initiative, bien que j’ai représenté le parti durant les discussions autour de cette marche, mais je n’étais pas d’accord. Puisqu’à quelques jours du début de la campagne électorale, il n’est pas prudent d’entamer une telle initiative. Car, le pouvoir risque de nous infiltrer avec ses hommes dans le but d’aller s’en prendre à la CENI. Conséquence : impossibilité d’organiser les élections, report des élections et le maintien de Joseph Kabila», dit Augustin Kabuya au sujet de la marche du 26 octobre prochain…
«Au sein de l’opposition unie, nous devrons donc procéder à la répartition des tâches de surveillance électorale à travers les différentes provinces. Nos équipes se chargeront entre-autres de l’identification de toutes les machines de vote que la CENI aura déployées. L’autre mission importante de nos équipes sera celle de ramener à notre centrale environ 90% des PV», déclare-t-il à propos de la machine à voter…
Le webmedia «LIBERTE PLUS» a publié le 19 octobre 2018 une longue mais très intéressante interview d’Augustin Kabuya, secrétaire général Adjoint de l’Udps en charge de la MIC (Mobilisation, Implantation et Communication). Autant il est vrai, dans ce parti, qu’il est prudent de prendre l’avis du président national (pour l’instant, c’est Félix Antoine Tshilombo Tshisekedi, alias Fatshi), que celui de ses proches, autant il est vrai qu’il arrive à ces derniers d’exprimer par procuration la position exacte du chef. L’interview d’Augustin Kabuya a pour mérite de clarifier la position de l’Udps par rapport au processus électoral. Le 1eravril 2018, à la surprise de tous ses «compagnons» de l’Opposition, ce parti a pris l’initiative solitaire de poser à la Céni ses 45 questions relatives toutes à la machine à voter. Depuis le 22 juillet passé, la Centrale électorale a répondu à chacune. De deux choses alors l’une : ou l’Udps n’a pas trouvé satisfaction (auquel cas le besoin de clarification devrait être exprimé), ou plutôt cela a été le cas (d’où le non-sens de poursuivre le débat). On peut dans cette logique le supposer avec quelque certitude : Fatshi a décidé de faire prendre à son parti les distances constatables. Et Augustin Kabuya s’est chargé de le faire savoir au travers de son interview. Il est à noter que jusqu’au moment où cette chronique est mise en ligne (dimanche le 21 octobre 2018 à 17h30), l’Udps n’a pas désavoué son secrétaire général adjoint…
Augustin Kabuya étale les reproches de son parti. Par exemple, s’agissant les attaques émanant des «partenaires de l’Opposition». «Nous constatons seulement avec beaucoup de regrets que certains hommes politiques en perte de vitesse que, d’ailleurs, nous connaissons très bien continuent à utiliser certains de vos confrères pour dire ce qu’ils n’ont la capacité de nous dire. Nous le mettons en garde et nous leur invitons de pouvoir tirer les oreilles de leurs garçons de course afin qu’ils cessent immédiatement à vilipender l’Udps et son leader. À défaut de quoi, nous serons obligés de répondre à chacun d’eux d’une manière vigoureuse».
Manifestement, allusion est faite à Francis Kalombo, proche de Moïse Katumbi, qui venait de soutenir la veille que «Les opposants qui accepteront d’aller aux élections avec la machine à voter seront considérés comme des traitres».
Aux Opposants qui préconisent le boycott des élections, Kabuya fait le reproche de la compromission. «Rappelez-vous qu’avant le début des dépôts des candidatures, nous, à l’UDPS, nous avons tenu une réunion à l’issue de laquelle la Direction politique du parti était sur le point de rejeter complètement l’étape des dépôts des candidatures. Nous avons toutefois demandé à notre président de faire appel à tous ses collègues présidents des partis politiques de la vraie opposition afin que cette option se fasse de manière globale au niveau de toute l’opposition (Mlc, Ensemble, Udps, Unc, Nouvel Élan, Congo na Biso et Dynamique de l’opposition) au terme d’une cérémonie solennelle en annonçant à la face du monde ‘que suite à la témérité de monsieur Nangaa de recourir à la machine à voter, nous avons levé l’option de ne plus déposer nos candidatures’‘. Pendant qu’on avait lancé cette initiative, nous avons été surpris curieusement de voir que certains de nos amis avaient déjà commencé à déposer leurs candidatures. Devant cette réalité, nous étions obligés, nous aussi, de déposer nos candidatures. C’est d’ailleurs parmi les raisons qui ont fait que notre candidat à la présidentielle dépose sa candidature à un jour de la fermeture des Brtc. Parce que nous, à l’Udps, on n’était pas vraiment sûr de ce processus», relève-t-il.
Et d’ajouter dans la foulée : «Maintenant que les noms des candidats et leurs numéros sont déjà inscrits dans le système, on veut nous faire croire que c’est en ce moment qu’il faut prendre l’option de se retirer du processus. Ce n’est pas sérieux ! À l’Udps, quand nous nous engageons dans une affaire, nous le faisons en âme et conscience».
L’Udps serait-elle victime de trahisonde la part de ses «partenaires» ? A cette question, Augustin Kabuya fait reparler l’histoire. «Les gens doivent apprendre quand bien même à nous respecter. Nous ne sommes pas en compétition contre quiconque. Nous avons été toujours victimes de la trahison. Pour avoir travaillé avec le feu docteur Étienne Tshisekedi, je sais combien on l’avait roulé dans tous les sens, même par ceux qui se disent opposants. On lui avait même refusé le droit de s’afficher comme le candidat commun de l’opposition (…) Nous avons de l’expérience. Du vivant de feu Docteur Étienne Tshisekedi, on nous avait fait marcher de la même manière. Auparavant, on était à Fatima ; après on a vu Sultani voir le jour. C’est pour vous dire que ‘ne soyez pas surpris du comportement de l’homme politique congolais’. Mais ce qui nous préoccupe présentement c’est de s’organiser, voir comment notre candidat peut accéder à la magistrature suprême. Pour le reste, nous souhaitons à tous seulement une bonne chance».
Et de la candidature commune ? La réponse d’Augustin Kabuya est spontanée. «Nous respectons les uns et les autres puisque nous sommes en démocratie. Mais, s’il faut qu’on discute sur cette question de candidature commune, on va en discuter, tout en sachant que le pays sera gouverné après le 23 décembre par monsieur Félix Tshisekedi qui est un candidat favori pour ce processus », déclare-t-il en rappelant à certains Opposants actuels leur responsabilité dans l’élimination du second tour en ce qui concerne la présidentielle.
«Je voulais préciser une chose autour de ce fameux dossier qui crache beaucoup d’encre et de salive : candidat commun de l’opposition, candidature unique, ainsi de suite… En principe, parler de cette question, c’est manquer du respect envers notre peuple. Car, tout au départ, la question de la candidature commune a été réglée dans la constitution, allusion faite aux deux tours du scrutin présidentiel fixé dans l’article 71. Mais, les hommes politiques avaient pris l’initiative de modifier malheureusement cette disposition en réduisant la présidentielle à un seul tour. Aujourd’hui, ils veulent se rebiffer sur un problème pourtant qu’ils ont eux-mêmes créés, oubliant que nul ne peut se prévaloir de ses propos turpitudes», rappelle-t-il, s’adressant ouvertement aux députés et sénateurs hier du G7, aujourd’hui d’Ensemble, mais avant-hier de l’Amp-Mp.
S’agissant alors du désistement éventuel de Fatshi en faveur d’un autre candidat, l’interviewé Kabuya tranche à la question de savoir si à 60 jours de la tenue des élections, la désignation du candidat commun de l’Opposition est encore faisable. «…je peux vous répondre d’emblée que notre candidat ne s’est pas improvisé. C’est le congrès extraordinaire historique de l’UDPS qu’il l’avait élu président de l’Udps, successeur du président Félix Tshisekedi. Et, deuxièmement, le même congrès l’avait investi candidat président de la République. Vous pensez que cela peut se décréter par une baguette magique que vous vous réveillez un matin et vous dites que je désiste au profit d’une telle ou telle autre personne. Là, nous serons obligés de retourner encore au congrès », affirme-il.
A «LIBERTE PLUS» qui veut savoir s’il est pratiquement impossible pour Fatshi de pouvoir se désister, il révèle : «Pour désister, il doit dire aux congressistes voilà que je renonce au mandat que vous m’avez donné. Et ensuite, on va tirer toutes les conséquences. Notre candidat n’est pas un électron libre. Notre candidat est le produit d’une élection Démocratique organisée à l’issue d’un congrès extraordinaire. C’est ça le problème ! ».
Déduction implacable : «Raison pour laquelle j’ai toujours parler avec réserve sur le dossier du candidat commun. Même le candidat en personne n’a pas ce pouvoir. Car, c’est le congrès qu’il l’avait investie, même moi votre invité, je n’ai pas ce pouvoir»…
Cette fois, il est prêt à prendre tous les risques
L’enseignement à tirer de ces quelques réponses est que droit dans ses bottes, le présidentiable de l’Udps est déterminé à aller seul aux élections si ses « partenaires » s’avisent à lui barrer le chemin par différents subterfuges dont la marche du 26 octobre, la machine à voter et la candidature commune.
C’est, en réalité, la fin du deal passé entre Félix Tshisekedi et Moïse Katumbi en décembre 2015 pour une Opposition conçue toujours en décembre 2015 à l’Ile de Gorée et formalisée à Bruxelles-Genval en juin 2016 en vue de rejeter toute possibilité de dialogue sous le mandat de Joseph Kabila avant de s’y résigner au centre interdiocésain de la Cenco et quasiment sombrer dans la bataille pour la primature.
Comme relevé dans des chroniques précédentes, à l’heure du bilan dudit deal, l’Udps réalise la perte sèche enregistrée tant il est vrai que ce parti a perdu son leader charismatique en la personne d’Etienne Tshisekedi, sa position de pilote de l’Opposition, mais aussi bon nombre de ses dirigeants au nombre desquels Samy Badibanga, Bruno Tshibala, Joseph Kapika, Valentin Mubake, Bruno Mavungu etc.
En s’accrochant aux revendications stériles sur la machine à voter, le fichier électoral etc., le parti a vite fait de comprendre que la politique de la chaise vide n’a jamais payé et qu’en plus, depuis les années Mobutu, les «Opposants de la 25èmeheure ou du dimanche» en profitent pour accéder aux affaires. Cette fois, il est prêt à prendre tous les risques.
Omer Nsongo die Lema/Cp